vendredi 15 septembre 2017

Oui et non… évidemment !

Anne Hidalgo à Lima après l'annonce de l'attribution des JO-2024 à Paris (photo © AFP), Puigdemont et Rajoy à Barcelone (photo © EFE), Marlène Schiappa à l'Assemblée nationale (photo © AFP).

Non, la énième provocation de Kim Jong-un ne doit pas être banalisée. Elle confirme ce que l’on savait déjà. La Corée du Nord maîtrise le lancement d’un missile susceptible d’atteindre une cible à quelques milliers de kilomètres de là, près de 4 000 cette fois. Elle a récemment effectué un sixième essai nucléaire d’une bombe H, dit-elle, qu’elle serait en mesure de « miniaturiser » pour l’embarquer sur un missile intercontinental. Suffisamment inquiétant y compris avec la part de doute pour que la communauté internationale et l’ONU y mettent un coup d’arrêt. Quand bien même en ne tirant pas en direction de l’île américaine de Guam et en choisissant une trajectoire plus haute et plus longue que la dernière fois, Pyongyang manifesterait un semblant de désescalade, il ne doit pas lui être permis de « terroriser » ses voisins japonais impunément. La gradation de sanctions à répétition – neuf « vagues » à ce jour –  atteint ses limites en particulier en ce que cette dictature militariste continue à s’approvisionner en pétrole par l’intermédiaire de la Chine. Le recours au blocus ne pourra pas être différé bien longtemps même si pour être « efficace » il suppose l’unanimité du Conseil de sécurité.

Oui, la situation en Catalogne est gravissime car l’affrontement entre Madrid et Barcelone atteint un paroxysme. Il ne reste que quelques jours pour éviter une confrontation sur le terrain aux conséquences difficilement mesurables. La Catalogne entend organiser le 1er octobre un nouveau référendum pour l’indépendance que Madrid fera tout pour interdire y compris par la force. Les directions en place de part et d’autre et les hommes de droite corrompus qui les incarnent n’ont aucune légitimité pour ouvrir une crise majeure dont ils seraient bien incapables de contrôler la montée aux extrêmes. Ni la Catalogne, ni l’Espagne, ni l’Europe n’en sortiraient indemnes. Bruxelles doit parler haut et imposer a minima le report de l’échéance. En Catalogne même, elle ne fait pas l’unanimité à la différence de l’exigence de pouvoir décider démocratiquement, très largement majoritaire. Rajoy n’est aucunement investi à Madrid pour user de la force contre la tentative du fait accompli de Puigdemont. L’amalgame que ce dernier cultive entre le Parti populaire et le franquisme est pour le moins outrancier. La consultation sous contrôle européen devra avoir lieu car le refus de celle-ci ne peut que renforcer la tentation de la « déconnexion » mais pas maintenant et dans ces conditions. 

Non, l’attribution de l’organisation des JO à Paris en 2024 n’est pas réjouissante. Pas simplement parce que l’organisation de ce grand cirque des anneaux est en général un gouffre financier pour les pays et villes retenus même si les conditions économiques poussent à la maîtrise des coûts. Pas simplement parce que l’attractivité qui est censée en résulter ne concerne pas par définition Paris, cité parmi les plus visitées de la planète. Pas simplement parce que les grands gagnants de ces opérations sont toujours les multinationales sponsors, exonérées d’impôt pour l’occasion. Mais aussi parce que la sécurité requise, outre son coût, épuise ceux qui l’assurent comme la société. Parce que la fête de la « victoire » dans un restaurant huppé de Lima souligne la démesure de la chose jusqu’au haut-le-cœur. Parce qu’ils célébreront encore l’antisémite notoire que fut Pierre de Coubertin, à l’avant-veille du génocide des populations juives d’Europe. Parce qu’enfin, la mise en exergue du spectacle sportif et d’un professionnalisme indécent est contradictoire avec le développement de pratiques sportives de masse, éducatives et profitables à la santé publique, dans la population en général et à l’école en particulier.

Oui, l’Europe doit avancer. Elle le fait parfois avec la taxation enfin réellement envisagée des géants du net et autres Gafa. Mais le discours de Junker devant le Parlement européen pêche toujours sur le caractère démocratique de l’attelage et des choix collectifs. Il sait que certains changements n’ont que trop tardé. Alors, il soutient… l’élargissement des décisions prises à la majorité, la désignation d’un ministre des finances qu’il verrait bien être le commissaire en charge de celles-ci – des fonctionnaires plutôt que des élus. Il propose même la fusion des fonctions de Président du Conseil et de la Commission. Mais, argumente-t-il, pas de Parlement de la zone euro à dix-neuf parce qu’elle représente 85 % du Pib de l’Union et que tous ont vocation à la rejoindre. Si certains États membres et à plus forte raison des États potentiellement candidats ne sont pas prêts à le faire, c’est d’abord parce qu’ils n’en ont pas les moyens faute d’un plan de soutien massif pour le leur permettre. L’on différerait ainsi la « fusion au cœur » au prétexte de ne pas pouvoir le faire au grand complet. Erreur historique. Oui, il faut un Parlement de la zone euro comme premier élément, pas le seul, d’une « démocratisation » des institutions européennes. Sur ce plan Macron, après Hamon et d’autres, a raison.

Oui, les lignes bougent en France, c’est certain. Avec l’initiative salutaire de Schiappa pour l’égalité dans l’entreprise. Une forme de verbalisation plus rapide, plus efficace et réversible pour sanctionner les contrevenants qui auront des difficultés à franchir les portes des appels d’offres après avoir été désignés à l’opprobre pour leurs pratiques sociales. L’OCDE prend acte après le FMI des « réformes » en cours, souhaitant leur accélération et leur amplification. Le caractère socialement déséquilibré de la politique gouvernementale affleure cependant entre les lignes. Et 68 % des Français selon un sondage considèrent que la mobilisation contre les ordonnances a été un « échec », percevant sans doute combien son caractère défensif est en décalage avec les enjeux. Ce serait pire sans doute face à un blocage minoritaire évoqué dans les transports routiers. Oui, le combat contre les politiques injustes est fondé mais pour être porteur et majoritaire encore faut-il qu’il propose des solutions alternatives et égalitaires de progrès social. Cela suppose qu’il se détourne des buttes témoins dont Mélenchon qui prônait jadis « l’humain d’abord » et se complaît désormais dans le bestiaire du zoo où il entend enfermer les socialistes et plus généralement ceux qui ne partagent pas ses délires « dégagistes » – il serait Président si seulement… Tournons la page, vite.


LIRE ÉGALEMENT
Corée : l’improbable guerre
L’Europe le peut
Travail, budget… Une « transformation » cadrée

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire