vendredi 6 octobre 2017

Ce qu’autorise la croissance

Devant le siège du FMI à Washington (photo © IMF).

Après plusieurs décennies de crises à rebondissement, elle est de retour. Une croissance solide que confirment, enquêtes après enquêtes, les instituts d'études comme les organisations coopératives internationales. Qu’est-ce que ça change ? Tout, sans doute. Les choix économiques en premier lieu qui sont profondément réorientés. Dans les grands groupes d’abord où la ronde des acquisitions, fusions et autres restructurations va s’accélérer. Non comme celles que nous avions connues auparavant fondées sur des logiques de consolidation financière, mais des alliances offensives partant à la conquête de parts de marché à l’échelle élargie de l’Europe et du monde. La fusion Siemens - Alstom n’est ainsi qu’une étape, comme le dit Le Maire, vers un regroupement plus large avec Bombardier et l’espagnol CAF dans le secteur ferroviaire. L’arrivée de Total sur le marché de la distribution du gaz et de l’électricité aux particuliers, parce que « le XXIe siècle sera électrique » comme le proclame son PDG, annonce un probable chamboulement à court terme, celui de quelques années tout au plus. On pourrait ainsi égrener sans peine une longue liste de changements restructurant les marchés et avec eux les habitudes de consommation. Le capitalisme qui n’a plus d’âge se réinvente un avenir qui à défaut d’être radieux serait au moins profitable, inégalement profitable cela va sans dire.

Là gît le défi principal de l’humanité, faire en sorte que la manne d’un nouvel « Eldorado » ne profite pas simplement à quelques-uns mais au plus grand nombre. Même les Cassandre vous diront que si rien n’est fait pour redistribuer au moins a minima alors le risque de l’explosion sociale deviendra plus grand, trop grand. Probablement. Produire plus, produire mieux sans obscurcir l’horizon climatique, n’a vraiment de sens que si tous en profitent. C’est vrai au niveau de l’entreprise comme dans l’ensemble de la société et au sein de la communauté internationale. Aucune objection sérieuse ne résiste à l’argumentaire en faveur de l’augmentation concomitante du gâteau et de la taille de parts enfin plus égalitaires. L’un ne va pas sans l’autre. C’est sur ce plan qu’une gauche refondée parce qu’utile retrouvera sa raison d’être. Loin des jérémiades des « décroissants » et autres adeptes du pessimisme sociétal décriant une « nature humaine » fantasmée. Tout en découle en effet en matière de justice sociale et de progrès dans la qualité de vie de l’ensemble de la société. Anticipation d’un futur moins funeste qui apparaît à ce jour encore bien incertain et c’est normal parce que nous ne sommes qu’au début du commencement d’autres possibles que ceux de la guerre et des rapines modernes de l’inégalité qui a explosé partout au profit d’un tout petit 1 % de privilégiés. Mais l’avenir n’est jamais « écrit » dans l’histoire humaine. Les « Justes » n’abdiquent pas.

On trouverait mille approches de cette marche quelque peu chaotique vers un « nouveau » monde dans l’actualité. Bien sûr non sans ratés, retards et embardées, mais là encore avec la possibilité de corriger le tir ce qui était infiniment plus difficile quand la croissance se traînait. Les « forçats de la route » ont ainsi « sanctuarisé » leurs acquis en matière de rémunération par un accord de branche dans la foulée des ordonnances. Cela ne plaide pas en faveur de celles-ci mais souligne que pour néfastes que soient ces textes pour plusieurs millions de salariés des petites entreprises, ils ne relèvent pas d’un « coup d’État social ». L’excès est toujours contre-productif surtout quand il empêche de concevoir une autre stratégie que celle du repli défensif dans l’outrance. Ce qui a été obtenu ici n’a pas de raison de ne pas l’être là précisément parce que la situation « objective » l’autorise, y invite. La prochaine passe d’armes sociale se jouera dans la fonction publique en général et à l’école en particulier. Les adaptations, les changements y sont indispensables afin que ce secteur devienne « porteur » parce qu’efficace au service de toute la société. Les syndicats catégoriels ne seront pas en mesure de jouer la partie s’ils restent incapables de se projeter dans le futur en inventant un autre service public et une autre école en faveur de tous, des usagers comme de ceux qui l’assument. Et demain, c’est tout de suite… Alors, chiche !

Reste la mousse, l’écume des choses. Celle que des médias en mal d’audience s’efforcent d’alimenter à la surface d’une actualité qu’ils se gardent trop souvent d’aller visiter en profondeur. Pourquoi ce secteur ne souffrirait-il pas des mêmes maux que le reste du corps social ? Les dérapages langagiers de Macron ne méritent pas que l’on s’y arrête longuement. Il est au nombre de ceux qui ont « foutu le bordel » bien avant son élection sous le précédent quinquennat avec une réforme du Code du travail mal assurée et à sens unique, doublée d’un recours à l’antidémocratique 49.3. L’héritier qu’il est en a remis une couche avec un recours aux ordonnances qui le sont à peine moins. La question de la mobilité et celle de l’organisation du travail sont des questions bien trop sérieuses pour être « traitées » par des raccourcis qu’ils expriment l’agacement ou une forme de mépris. Passons à autre chose. La lente dégénérescence de la France Insoumise doit enfin inquiéter. Qu’un courant issu de la gauche se vautre dans le chauvinisme cocardier et anti-européen avec le soutien du FN dans l’affaire du drapeau européen à l’Assemblée n’est pas anecdotique. Le comportement de l’une de ses dirigeantes « oubliant » ce qu’implique le régime de retraites par répartition ou le minimum de déontologie militante ou professionnelle à l’antenne n’est guère rassurant non plus. Sans compter la mise en cause de la suppléante de Ruffin, odieusement complaisante avec les crimes islamistes. Non, ce n’est pas ça la gauche. 



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