mercredi 28 mars 2012

Policiers : gardiens de la paix ou hommes de guerre ?

© R. de la Hoya

Il aura suffi de la mise en examen d’un membre des forces de l’ordre responsable de la mort d’un homme abattu « d’une balle dans le dos » pour qu’aussitôt le climat s’échauffe et que les dérapages fusent.

Prompte réaction de corps d’abord de syndicalistes de la police nationale qui ne supportent pas la mise en cause de l’un des leurs. Piètre combat en vérité qui laisse à penser que « la présomption d’innocence » avant tout jugement n’existe pas pour un mis en examen.

Cela en dit long sur le mépris entretenu de l’institution judiciaire, généralement vilipendée pour son « laxisme », mais, vouée à la vindicte quand les juges font tout simplement leur boulot. Deux poids, deux mesures qui ne sont pas acceptables d’un point de vue démocratique.

Exigence irresponsable ensuite de l’un de ces syndicats d’officiers – classé très à droite - de se voir octroyé par la société et le pouvoir politique le privilège exorbitant de pouvoir tirer sans qu’une situation de « légitime défense » ne l’exige.

Y souscrire comme l’a fait aussitôt Sarkozy s’explique. Il n’a plus rien à perdre dans sa course folle au « miracle » qui par définition ne peut être « républicain ». Mais, tête-à-queue pour pas mal d’autres, pourquoi ? Pour Me Le Pen, c’est autre chose, elle est dans son « rôle » malfaisant.

La police conçue comme un service public démocratique n’a nul besoin d’un apparentement  avec l’armée en situation de guerre. Imagine-t-on, par exemple, la police de proximité, demain, dans les quartiers, les cités... en guerre et contre qui ? Et si ce n’est dans les faits, au moins dans les têtes.

Si, en 2005, une telle possibilité avait existé, les émeutes se seraient possiblement soldées par la perte de vies humaines au risque d’enflammer bien davantage, au-delà des quartiers concernés, la société dans son ensemble. Il n’en fut rien et c’est heureux.

Mettre le doigt dans cet engrenage serait particulièrement dangereux, au prétexte que les gendarmes, relevant d’un corps militaire, disposent d’une « faculté » de tirer sans y être en droit commun « autorisé » par des circonstances de « légitime défense ».

Après la police nationale, faudra-t-il, un jour, en faire « bénéficier » les policiers municipaux ? Tout cela n’est pas raisonnable même envisagé du strict point de vue de l’ordre ou plutôt de la tranquillité publique. À plus forte raison quand on se revendique à gauche d’un espace public démocratique et des libertés.

C’est précisément en sens contraire qu’il faut aller pour réintégrer la police dans la société et assurer aux policiers, aux gardiens de la paix, le respect auquel aspirent la majorité d’entre eux à la différence sans doute de quelques « cow-boys » du macadam qui se vivent au-dessus des lois.

Il faut donc supprimer le statut de militaire des gendarmes en leur accordant notamment, comme les policiers, la possibilité de s’exprimer et de s’organiser syndicalement. Les policiers seront respectés de tous parce que la police respectera elle-même tous les citoyens et non l’inverse. Cela exige certes des moyens mais moins techniques que de formation et d’éducation.

Nous devons enfin nous inspirer davantage de la plupart des autres États européens. Que l’on pense, par exemple, à l’admirable sens démocratique dont témoigne depuis un an la société norvégienne confrontée à une tuerie sauvage de 77 de ses enfants. La force d’une société démocratique c’est d’abord cela.

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